L’insulinothérapie fonctionnelle
L’insulinothérapie fonctionnelle est une méthode qui vise à imiter au plus juste la façon dont le pancréas produit naturellement de l’insuline. Elle est basée sur le calcul des glucides et l’ajustement des doses d’insuline à administrer en fonction. Sa mise en place nécessite une formation au sein d’un service spécialisé.
Voici un petit guide de l’insulinothérapie fonctionnelle pour tout savoir sur cette méthode qui, bien maîtrisée, offre un meilleur contrôle de la glycémie et une meilleure qualité de vie aux patient(e)s dont le diabète est traité par insuline.
L’insulinothérapie fonctionnelle : définition
L’insulinothérapie fonctionnelle est une méthode qui permet à un(e) patient(e) dont le diabète est traité par insuline d’ajuster au plus près la quantité d’insuline à administrer en fonction de son alimentation et de son mode de vie.
Pour ce faire, l’insulinothérapie fonctionnelle distingue :
Les besoins en insuline basale (« insuline pour vivre »), qui couvre les besoins tout au long de la journée.
Les besoins en insuline prandiale (« insuline pour manger »), qui couvre les besoins en insuline lors des repas et/ou collations.
Les besoins en insuline de correction (« insuline pour soigner »), qui couvre les besoins en insuline en cas d’hyperglycémie physiologique (hors prise alimentaire).
L’insulinothérapie fonctionnelle est relativement simple en théorie : elle consiste à évaluer les besoins en insuline prandiale grâce au calcul, à chaque prise alimentaire, de la quantité de glucides ingérée. C’est ce calcul des glucides qui permet d’ajuster la dose d’insuline rapide à administrer au moment du repas.
Le résultat, c’est une glycémie mieux maîtrisée en étant beaucoup plus précis sur les doses injectées aux repas et les doses pour corriger une hyperglycémie. Les hypoglycémies et les hyperglycémies deviennent alors plus rares. C’est aussi plus de flexibilité et de liberté puisque l’insulinothérapie fonctionnelle permet d’adapter le traitement de son diabète à sa vie, et non l’inverse, en permettant de manger ce dont on a envie, quand on en a envie.
L’insulinothérapie fonctionnelle, pour qui ?
Pour les adultes et les enfants qui vivent avec un diabète de type 1, et pour les patient(e)s dont le diabète de type 2 est traité par insuline, l’insulinothérapie fonctionnelle peut-être réalisée que l’on soit sous pompe à insuline (schéma « basal-bolus ») ou traité par multi-injections (lente et rapide) avec une seringue ou un stylo.
Attention : l’insulinothérapie fonctionnelle ne peut pas être mise en place en cas de traitement par multi-injections d’insuline mixte.
L’insulinothérapie fonctionnelle en pratique
Les patient(e)s traité(e)s par pompe à insuline ou par multi-injections sont le plus souvent placés sous le schéma insulinique appelé « basal-bolus ». Il tient son nom de l’association de l’insuline basale ou lente (le débit de base) et de l’insuline rapide (bolus) :
L’insuline basale couvre les besoins sur l’ensemble de la journée.
Le bolus est réalisé au moment et en fonction des repas. Le bolus sert également à effectuer une correction lorsque la glycémie augmente de façon inhabituelle. Dans ce cas de figure, il peut être administré en dehors des repas afin de respecter les objectifs glycémiques. C’est ce qu’on appelle un bolus correcteur.
En pratique, l'insulinothérapie fonctionnelle est basée sur l’établissement d’un ratio qui correspond à un nombre d’unités d’insuline à injecter au moment des prises alimentaires en fonction du nombre de glucides ingérés au cours du repas, afin de maintenir une bonne glycémie. Le ratio s’exprime en gramme de glucides par unité d’insuline (UI) : il peut être par exemple d’1 unité d’insuline pour X g de glucides ou de X unités pour 10g de glucides.
À noter qu’en fonction de l'âge, mais aussi en fonction du moment de la journée, la sensibilité à l’insuline varie. Ainsi, il est nécessaire de définir 3 à 4 ratios par 24 heures.
Focus sur le calcul des glucides et la dose d'insuline à administrer
Comme vu précédemment, la maîtrise de l’insulinothérapie fonctionnelle nécessite d’apprendre à calculer le nombre de glucides contenus dans les différents aliments qui composent un repas, et ce de manière la plus précise possible pour adapter la dose du bolus au plus près.
Pour ce faire, il faut :
Connaître la valeur glucidique de l’aliment consommé, c’est-à-dire le nombre de glucides que chaque gramme apporte (exemple : les pâtes sèches cuites apportent environ 30g de glucides pour 100g).
Estimer la quantité de l’aliment consommé pour savoir combien de glucides viennent d’être absorbés (exemple : cette assiette bien remplie représente environ 150g de pâtes, donc j’ai mangé à peu près 45g de glucides).
Savoir combien d’unités d’insuline rapide il faut faire pour 10g de glucides (on parle de coefficient repas – il est spécifique à chaque patient(e) et peut être calculé par l’équipe soignante).
Dans le cadre d’un bolus de correction, il est indispensable de connaître sa sensibilité à l’insuline (savoir de combien de grammes par litre une unité d’insuline rapide fait baisser la glycémie).
À noter que la plupart des personnes pratiquent « l’insulinothérapie fonctionnelle au feeling », en se basant sur des expériences passées (quand je mange une pizza je me fais 2 unités en plus). C’est efficace dans une certaine mesure, mais il est rare que l’on tombe sur des glycémies parfaites après ; alors que maîtriser toutes ces données permet de calculer exactement la dose d’insuline à administrer avant chaque repas
Les patient(e)s sous pompe à insuline ont un petit avantage : en utilisant l’assistant bolus (un paramétrage proposé dans plusieurs pompes à insuline), il leur suffit de rentrer la quantité de glucides consommée et la pompe à insuline leur propose la dose d’insuline à injecter : un calcul en moins à faire !
Dans tous les cas, attention, une fois que le bolus a été administré, il ne faut pas modifier la composition du repas car :
En mangeant moins que prévu, la dose d’insuline sera trop importante et il y a un risque de faire une hypoglycémie.
En mangeant plus de glucides que prévu, il sera alors nécessaire de réaliser une injection complémentaire pour éviter une hyperglycémie.
Comment apprendre l’insulinothérapie fonctionnelle ?
Pour apprendre l’insulinothérapie fonctionnelle, il faut impérativement être formé par une équipe multidisciplinaire de traitement du diabète. Elle seule permettra, en effet, de mesurer vos besoins de base (insuline lente ou débit de base si vous êtes sous pompe à insuline) en réalisant, dans certains cas, un jeûne glucidique durant 24 heures. Les modalités précises de formation dépendent de l’équipe médicale qui vous suit.
Durant cette formation à l’insulinothérapie fonctionnelle, le ou la diététicien(ne) vous apprendra à compter les glucides que vous consommez. Il ou elle sera présent(e) à vos côtés lors de chaque repas afin de vous aider à estimer les quantités que vous mangez et d’en déduire la quantité de glucides totale du repas. Des produits sucrés seront proposés à chaque repas, aucun interdit, chacun(e) mange ce qu’il/elle veut en quantité libre.
L’infirmier(e) d’éducation et le/la diabétologue vous apprendront à calculer vos coefficients de repas, vous expliqueront la conduite à tenir en cas d’hypoglycémie ou d’hyperglycémie, en cas de pratique d’une activité physique, etc.
Par ailleurs, de nombreux documents et applications pour téléphone existent pour aider à calculer les glucides. En complément de cette formation, ils peuvent se révéler très utiles pour mettre en pratique l’insulinothérapie fonctionnelle.
Les avantages de l’insulinothérapie fonctionnelle ?
Une fois que l’insulinothérapie fonctionnelle est bien maîtrisée, elle apporte beaucoup de bénéfices au quotidien :
Les séances d’apprentissage de l’insulinothérapie fonctionnelle permettent de se familiariser avec la maladie et ainsi de mieux connaître le diabète.
Les calculs de doses d’insulines étant plus précis, ils permettent de limiter les hyperglycémies ou les hypoglycémies, et donc d’améliorer l’équilibre du diabète.
Le nombre d’hypoglycémies modérées et sévères est diminué, comme l’ont montré de nombreuses études.
Le/la patient(e) a plus de liberté alimentaire, il/elle peut manger ce qu’il/elle veut, puisque la dose d’insuline est calculée en fonction, en se basant sur son ratio.
Goûter d’anniversaire, glace ou friandise… l’insulinothérapie fonctionnelle permet de gérer les extras et de céder occasionnellement à la gourmandise.
Les contraintes de l’insulinothérapie fonctionnelle ?
Même si les bénéfices de l’insulinothérapie fonctionnelle sont nombreux, il existe tout de même des contraintes liées à sa mise en place :
La difficulté liée à l’apprentissage des aliments et leur teneur en glucides, notamment chez les enfants.
L’augmentation du nombre de mesures de la glycémie capillaire à réaliser chaque jour pour vérifier que l’apport d’insuline a été adéquat ; mais cette contrainte peut-être allégée par l’utilisation d’un système de mesure en continu du glucose (MCG).
En savoir plus sur notre accompagnement ?
Sources :
Fabrice Dumont et Stéphanie Mochon. L’éducation à l’insulinothérapie fonctionnelle chez l’enfant. SOiNS, n°769- octobre 2012.
Traitement : comment traiter mon diabète ? L'insulinothérapie fonctionnelle. Hôpital européen Georges-Pompidou HEGP. Mis à jour en juin 2015. Consultable en ligne : www.hegp.fr/diabeto/traitementinsulineif.html
Manel J, Leila S, Maha K, Koussay A, Rim B, Sihem T, et al. - Étude de l’équilibre glycémique, de la fréquence des hypoglycémies, de la diététique et de la qualité de vie chez les diabétiques de type 1 après insulinothérapie fonctionnelle. Diabetes Metab. 1 mars 2011;37(1, Supplement 1):A50‑1.
Ballaziri H, El Aziz S, Chadli A. Hypoglycémie avant et après l’insulinothérapie fonctionnelle (à propos de 60 cas). Ann Endocrinol. 1 sept 2017;78(4):409.
F.Z. Melki, S. Elkhadir, H. Salhi, H. El Ouahabi, L’insulinothérapie fonctionnelle : modalités pratiques et impact métabolique. Annales d'Endocrinologie. Volume 82, Issue 5, October 2021, Page 517.
Direction de la Prestation de Dinno santé.